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À 8h15, mon père m'a annoncé que ma grand-mère a chopé un cancer de l'œsophage et du foie en essayant de soigner son cancer du sein.

À 8h30, j'ai versé deux larmes.

À 9h20, j'ai la gerbe.

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Un grand homme noir. Gigantesque, avec de grandes mains, ridées. Sèches, mais chaudes. Il tenait cette femme blonde dans ses bras, cette femme si fragile. Sa taille menue était serrée dans une robe si courte, si moulante, si rose. Elle avait mis du rouge à lèvre rose aussi, et ses grands yeux bleu, si vifs, si pétillants souriait à ce grand homme poli. Il la tenait fort dans ses bras, et au son d'une douce valse, il la faisait danser entre les verres et les assiettes. Le sol était abimé, vieux, brûlé, la peinture sur les murs s'écaillait, et l'évier gouttait. Mais une lumière violette, si douce, comme la valse, passait à travers les carreaux sales. Et puis, la musique s'est arrêté, et l'homme noir continuait de faire valser la poupée dans ses bras. Ses petits doigts ne touchaient plus sa vieille veste en tweed vert, ses petits pieds dans de jolis escarpins blancs grattaient le sol, et il la serrait tellement fort contre lui. La lumière s'est tue, elle aussi. Il a lâché la femme, et elle est tombée. Ses boucles blondes ont tressauté contre son visage clair, violet. Sa robe rose se plissait au dessus de ses jambes de chiffon, et un de ses escarpins était posé là, contre un placard. Il a ajusté son chapeau gris sur sa tête, il a regardé la poupée inerte, froide sur le sol. "Elle est morte, monsieur", a-t-il dit au groom qui se tenait sur la terrasse rongée, et qui regardait la scène sans rien dire. Le grand homme noir s'est incliné, comme une dernière révérence à celle qui fut une adolescente blonde, et il est sorti. Pour boire une bière, en écoutant du jazz, dans un bar doré. Pour trouver une nouvelle cavalière à cette douce valse violette, si claire.

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Et puis, il est arrivé. Il faisait noir, et une odeur de bière se mélangeait à celle de la glycine. Il a fermé le portail, et le bruit a résonné jusque dans le canapé, où ils étaient tous en train de rire. Elle tenait une cigarette entre ses doigts, et le regardait comme s'il était le dernier des cons. Il s'est mis à crier, et sous la lumière blanche du lampadaire, il paraissait encore plus grand. Il hurlait, et elle recula, en recrachant la fumée de sa cigarette au-dessus de sa tête. Un nuage de cendre au dessus de ses jolis cheveux roux. Il a crié encore plus fort, son visage était totalement déformé, et la main s'est abattue sur sa joue. Lourdement, dans un grand bruit, il a frappé. Une fois. Elle a reculé encore plus, la bouche ouverte. Il a continué d'hurler, et il l'a frappé encore une fois. Encore plus fort. Elle a essayé de crier à son tour, mais elle n'a pas eu le temps, que la grande main claquait encore une fois sa joue. Cette fois, une peu de sang a giclé; il portait toujours cette grosse bague. Elle a hurlé cette fois-ci, mais la musique était trop forte. Alors, elle a attendu, dans le froid, dans le noir, contre la terre gelée, à côté des racines, elle a attendu que les coups pleuvent, et qu'il se lasse. Il ne s'est jamais arrêté, et j'ai senti les coups dans mon ventre trop longtemps.

Avant de me reveiller, le corps courbaturé, les yeux larmoyants.

18/4 _ 22:03

http://summertime.cowblog.fr/images/100308090530466087pola01.jpg"Ma fille, tu est trop casanière!"
Ta fille, elle s'en fout. Elle mange du chocolat Côte d'Or, arrosé d'un Efferalgan tout en regardant la pub à la télé. Ta fille, elle a vomi il y a trois jours, à 4h50 du mat', et elle te l'a pas dit. Ellle t'a pas dit non plus son presque malaise le jour même. Mais ce n'est que presque. Alors oui, ta fille, elle a décidé de ne pas aller à une soirée, juste pour se moucher plus tranquillement au fond de son lit, à 21h40 un samedi soir. Mais ta fille, elle passe son bac, ça la bouffe, ça la bouffe, et en plus, elle a dormi sous une tente mardi soir pour voir quatre petits souvenirs sur scène. Alors bon, ta fille elle sortira un autre jour.



(À part ça, j'ai une nouvelle robe de petite fille, avec des petits coeurs partout. C'est la robe du printemps quoi.)

29/3 _ 18:40

Passer mes mains dans ma nuque, relever mes petits cheveux, et glisser un crayon ou un bracelet dans mes cheveux. C'est dingue comment de simples gestes de la vie quotidienne peuvent devenir si maladifs, si malsains. Les mains tremblantes, comme si j'étais sous médicaments, comme si j'étais sans cesse animée par la peur. Et pourtant le soleil brille haut dans le ciel, les nuages roses fleuris embaument les rues, et j'aime, j'admire, je vénère le printemps. Mais ma tête, elle est malade. C'est comme si rien n'existait, comme si je regardais un film de Scorsese. Il y a trop de lumière, et les nuits sont trop courtes. C'est comme je n'existais pas, comme si je n'étais pas là. Oh, je ris, je travaille, je discute, je claque des mains, je machouille, j'écris, je lis. Tous les jours. Mais ce n'est pas moi, ce n'est qu'un rêve. Je me lève, et je me couche, le reste n'existe pas. C'est un mot, une ligne, un paragraphe, une page, un chapitre. Rien de plus. Ce n'est pas moi qui court après mon bus. Ce n'est pas moi qui ait les mains tachées d'encre. Ce n'est pas moi qui fume une cigarette en écoutant de la pop-folk à ma fenêtre. Ce n'est pas moi qui relève sans cesse mes cheveux sur ma tête. Je n'existe pas, et la peur, l'angoisse n'existe pas. Il n'y a que des faits, qu'une liberté. Je ne suis pas.
Elle m'a dit "vivement l'année prochaine, que ça commence, vraiment". Je ne suis pas sûre d'avoir la force de commencer, de continuer, de finir. Tout est trop long et je suis trop faible. Et je ne crois pas avoir envie de m'effondrer en milieu de parcours. Autant en finir, maintenant.

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20/3 _ 15:41

Ces derniers temps, j'ai l'impression d'être un énorme sac en toile marron. Un truc un peu moche, un peu décrépi - mais solide ! Un énorme sac qu'on essaye de remplir, de remplir, de remplir de mots, de dates, de noms propres, de citations, de méthodologie, et de mots encore de mots. Et à croire que cet énorme sac n'est pas si énorme que ça. Et qu'en plus, il y a un trou au fond. C'est comme les amphores percées de Danaïdes cette histoire.
Sauf que je suis sensée rendre l'eau encore meilleure que lorsqu'elle est rentrée. Ça risque d'être compliqué.

Parce que comme tu l'as dit, faire de la philo, ça revient à découper une feuille de papier consciencieusement en 40 000 morceaux. Et Kant, il fait ça avec les doigts de pieds en plus.

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