Parfois l'énorme truc qui dort au fond de mon ventre se réveillé, remonte le long de ma gorge en prenant tout l'air et se tapit derrière ma langue. À ce moment là, rien ne sert de fermer les yeux, de se boucher les oreilles ou d'essayer de le chasser avec la fumée. Rien a faire, ce truc reste là, point.
En général j'oublie. J'oublie que je suis toute seule dans ce lycée, que mes amis sont loin, trop loin, de plus en plus avec le temps. En général, j'oublie, et j'arrive à me persuader que tant pis si je passe mes week-end à travailler, et c'est tout, après tout, c'est pour la bonne cause. En général, j'imagine un futur meilleur avant de m'endormir avant la nuit. Mais je sais que ma vie est déjà en train de s'effilocher entre mes doigts, de partir en fumée.
À croire qu'on ne peut pas tout avoir. Et si encore j'y arrivais bien, très bien. Mais ce n'est que effort, encre sur les doigts, et lettres dactylographiés pour quelque chose de pas trop mal.
 

05 mars 2010, Bercy, 21 heures ; 30 SecondsTo Mars.
Il y a des choses qui ne peuvent même pas se dire. Sourires, chance, main droite, sourires, sourires, rires, yeux plein d'étoiles, sourires. Sourires à m'en péter la machoire.

La liberté de l'indifférence défend la contingence des actions humaines. Et le déterminisme n'amène pas toujours le necessitarisme qui est une forme de fatalisme. "Nous sommes condamnés à être libre". Marx critique l'idéalisation de Hegel et définit la liberté comme le processus concret de libération de la servitude de la lutte de classes. Le complexe de Buridan, aujourd'hui insoutenable. Et je peux pas sacquer Kant.

Des fois, je me demande ce qu'il m'a pris quand j'ai signé ce foutu bout de papier, avec pour entête, "Inscription à l'épreuve de dissertation philosophique du concours général".
Je m'en retourne à mon dossier violet d'une centaine de page.

La neige s'est empilé sur le balcon. De la même façon que les livres s'empilent sur ma table de nuit.
Tu sais, j'aimerais emporter toute la bibliothèque municipale avec moi (et encore, ce ne serait pas assez). Alors quand je serais grande, si je ne passe ma vie à rencontrer des légendes musicales, je vendrais des livres. Toute sorte de livres. Parce que c'est vendre des petits objets précieux que de vendre des livres. C'est vendre une part de rêve, un sourire, une larme. Et si je pouvais, je les donnerai tous ces mots qui dansent, s'entrechoquent, sursautent, bondissent et s'enroulent autour de nos poignets et de nos lèvres.
Je suis tombé dans un livre quand j'étais petite.

(Evidemment, l'image n'a rien à voir. Mais parfois je ne sais plus ce que je veux telltement j'en veux. Je crois que la danse me manque, je crois que j'aimerais retoucher une harpe (juste pour voir), je crois que j'aimerais passer ma vie à découper des images pour faire des jolis murs et des jolis cartes de voeux, je crois que si seulement je le pouvais, j'aimerais être ce qu'on appelle une artiste.)

Je ne sais pas ce que j'avais stupidement espéré. Pour une fois que je me laissais à espérer, alors que d'ordinaire je n'attends jamais rien de leur part.
C'est dingue comment j'avais réussi à me mentir, à me faire croire que tout allait bien. Alors qu'en fait, ça bouillone tellement à l'intérieur. Et ça a explosé.  Pour rien qui plus est.

Parce que tu vois, ce qu'ils n'arrivent pas à comprendre, et ce qui est purement et si bêtement égoiste, c'est que j'ai besoin d'un chez moi. Un véritable endroit où je suis contente de me retrouver le soir, qui ne serait à moi, rien qu'à moi. Juste une pièce, c'est tout, au lieu de ces chambres d'appoint.

J'ai recommencé à espérer juste pour quelques minutes, et je me souviens maintenant pourquoi j'avais arrêté de le faire. J'en ai marre de me casser la gueule.